vendredi 19 novembre 2010

Les dix premières minutes de « Venus Noire »

Mercredi dernier, 10 novembre 2010, j’ai tout fait pour assister au cinéclub de l’Africa qui commence à 19h. Vers 18h45, j’étais au belvédère, pas de taxis, pas de bus, il pleut et je suis seule. Je marche en presque courant… heureusement, un bus s’arrête et m’emmène à l’Avenue Habib Bourguiba.

J’arrive à 19h10, le film n’a pas encore commencé. Parfois, j’adore les rendez-vous arabes ! Je trouve une place difficilement à côté d’une amie. On me donne même des kakis… je suis heureuse ! ouuh ! Enfin, Je vais voir  le film « Vénus Noire » d’Abdelletif Kechiche dont beaucoup de mes amis m’en parlent et dont j’ai lu et vu des articles et reportages intéressants.

Le générique commence, j’ôte ma veste. Je garde toujours le sourire du vainqueur qui reçoit finalement sa récompense.  J’ai toujours considéré qu’un film dans une salle du cinéma en fin d’une longue journée de travail ou d’études doit être une vraie récompense. Sur un fond noir les noms commencent à défiler … mon imaginaire commence à anticiper : deux heures remplies d’émotions ! De bonheur ! Et certainement de larmes …

Paris, 1817, dans un petit amphithéâtre d’une faculté de Médecine, des médecins applaudissent l’arrivée d’un Docteur ou anatomiste qui semble avoir une grande importance dans le film. Des tableaux laissant montrer des vagins bien ouverts, déchirés et détaillés … et un drap cachant un corps ou un statut debout. Après un moment de silence, l’anatomiste commence sa démonstration. Et c’est à ce moment que commence  la torture !

Il commence à parler de ses découvertes, de la femme, de ses parties génitaux et des singes. A ce moment, je commence à avoir la chair de poule. Il dévoile le corps d’une femme noir « Vénus Noir » de son vrai nom Saartjie Baartman (la Vénus Hottentote) morte mais debout, laissant penser qu’elle était surgelée ou vidée de ses organes. Horrible mais supportable à voir quand même …

Un instant après, l’anatomiste fait circuler un bocal contenant toute la partie génitale de la femme. Horreur !! Je ferme inconsciemment  les yeux ! Mais la torture continue … j’entends toujours le discours hallucinant du Docteur : « cet être inférieur à notre espèce a parfaitement le même vagin que nos femmes… ».

J’ouvre les yeux. Fière de sa découverte, le scientifique montre de doigt le « tablier » ou comme il les a décrit « les petites lèvres vaginales élonguées de ce monstre »… Nausée, chaleur, vision floue, battement de cœur rapide et étouffement … putain ! Je m’évanouie !  Mais la docteur continue quand même à montrer la méthode utilisée pour extraire le vagin et les découvertes faites grâce à cette méthode…

«  Je suis persuadé que cet femme est plus proche des singes que de l’homme blanc » … je ferme encore une fois les yeux mais ses paroles me torturent encore plus ! « J’ai bien étudié tous ses organes du cœur en passant par les poumons jusqu’au cerveau… » Dit-il alors que je cherche désespéramment une bouffée d’air frais.

A ce moment, une copine à mon côté, remarque ma respiration difficile et me donne de l’eau … ouf ! Je me redonne l’espoir de continuer le film comme une grande. Et c’est là que le fameux docteur fait sortir d’un tiroir la tête d’une momie. Merde ! Je vais vomir … non, non, nooon …

 J’entends plus ce qu’il dit quand tout s’arrête ! « henda ! Ce n’est qu’un film ! Ne soit pas conne ! Ce n’est qu’une première séquence  qui ne durera plus que 5 minutes… » Je me dis en m’accrochant au bras de ma pauvre patiente copine. Ça va ! Ça va ! Je peux continuer jusqu’à la fin …

L’anatomiste reprend pour dire en regardant la Vénus Noire « Je n'ai jamais vu de tête humaine plus semblable à celle des singes ». Nausée, dégoût, larmes, étouffement, abattement … ma copine me chuchote « sors henda ! Sors ! »… oui, ok, d’accord, tout de suite … je prends la dernière force qui me reste et je bouscule les gens assis à mes côtés … tant pis pour tous les « oohh ! Quelle connasse ! Elle vient juste de s’assoir ! » … je sors, je me sauve de cette torture … au diable le cinéclub ! Au diable l’anatomiste psychopathe et ses disciples monstrueux!

En sortant, je vomis, je pleure, je respire, j’ouvre les yeux, je me lave le visage, je m’assoie sur les escaliers de la salle du cinéma… c’est bon ! C’est fini la torture !  Je prends mon téléphone, j’appel mes amis pas loin de l’Africa … je les rejoins à un café tranquille… ils se moquent de moi, normal … c’est moins douloureux que la démonstration du Docteur parisien.

En rentrant, je pense au film… euuh, je veux dire je pense aux dix minutes que j’ai vu du film (en fermant parfois les yeux) ! Des images horribles gravées dans la mémoire. Des visages féminins immobiles, froids, sans expressions, me reviennent aussi à la mémoire … comment mes voisines à la salle de l’Africa se sont-elles arrivées à continuer la séance de torture ? Question débile, finalement, je m’en fou ….

2 commentaires:

  1. J'ai vu aussi le film. Certes le film est très choquant, mais il faut le voir car avec ce film, Sawtche connue sous le nom colonial de Saartjie Baartman aura retrouvera se dignité!
    Car Abdelletif Kechiche a voulu retracer la passion (du christ) de la Vénus Hottentote en pointant du doigt la racisme et la xénophobie qui gangrène les âmes des sociétés occidentales.
    Dans le monde, de nos jours, il y a des millions de Saaritje, il suffit de voir comment l'industrie de la pornographie est de loin la plus florissante sans parler des mouvements sado-maso, bandage, fétichistes, MILFs, ebony etc...
    Chère Henda, la barbarie de l'Homo sapiens n'a pas changé mais elle a muté en d'autres formes.

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  2. Tu es courageuse au moins, moi je me suis contenté de lire à propos du film et de Saartjie Bartman, j'ai lu son histoire et je crois que même les images que j'ai imaginé et les scènes, bien qu'atroces, je crois qu'elles sont incomparable par rapport aux scènes du film et encore de la réalité que cette femme a subi.
    J'ai pas pu aller voir le film.

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